Nous avons cueilli la vérité au jardin
Sous le regard timide d’une fleur anonyme
Nous avons atteint l’éternité
Dans l’instant infini
Où deux soleils se font face
*
Je ne parle pas
Des murmures effrayants dans la pénombre
Je parle de la lumière du jour
Des fenêtres ouvertes et de l’air frais
D’un fourneau où brulera l’inutile
*
Et d’une terre fertile
Aux floraison variées
De naissance, d’évolution et de fierté,
Je parle de nos mains amoureuses,
Passerelle pour traverser la nuit lumineuse,
Bercée par les parfums et la brise.
*
Viens dans la prairie
Dans la vaste prairie
Et appelle moi à travers
Les houppes soyeuses des acacias
Comme le cerf appelle sa compagne.
*
Extrait de la Conquête du jardin de Forough Farrokhzad
J’ai découvert cette femme poète iranienne grâce au livre « l’oiseau captif » de Jasmin Darznik que je vous recommande . Une biographie romancée bouleversante de cette jeune femme éprise de poésie qui n’a jamais renoncé à sa liberté, à son indépendance malgré toutes les souffrances et renoncements.
Forough Farrokhzad a grandi à Téhéran dans les années 1930, au sein d’une famille de sept enfants. Dans la maison règne une discipline de fer, et les enfants n’appellent pas leur père « papa », mais « général ». Très tôt, Forough manifeste un vif intérêt pour la poésie persane et dévore les recueils que ses frères étudient, eux qui ont la chance d’aller à l’école. À l’âge de seize ans, Forough épouse son amour de jeunesse, Parviz, sur décision du général qui tient à éviter un scandale. Mais alors que beaucoup de jeunes filles n’ont pas la chance d’épouser l’homme qu’elle aiment, Forough ne tarde pas à déchanter : l’homme qu’elle a épousé n’est pas exactement celui qu’elle imaginait.
Alors elle se remet à écrire et entre ses vers se devine quelqu’un qui ne fait pas semblant de vivre. Une femme, une vraie. Et même une poétesse. Une qui, sans même s’en rendre compte, va révolutionner la scène littéraire iranienne en écrivant sur le sentiment amoureux, le désir et l’amour charnel, des thèmes traditionnels de la poésie persane, mais qui, venant d’une femme, vont provoquer un séisme sans précédent dans la société iranienne et vaudront à Forough Farrokhzad une réputation sulfureuse.