Jeudi poésie

Jill Bill ( clic) à la barre du bateau des Croqueurs de mots pour la quinzaine nous donne comme thème : revenir, le retour .

Printemps est revenu ,

Chante  la violette,

Sans courber la tête

Près de l’arbre chenu .

Les cygnes vers les  nues

Se joignent à la fête

Quand le soleil prête

Ses rayons  assidus .

Même les gendarmes,

Sur l’écorce grenue,

Déposent les armes,

Pour Râ le bienvenu .

Le vent  en goguette

Chasse les nuages,

Courbant les fleurettes

Au seyant corsage.

Je vous propose aussi ce poème de Georges Rodenbach

Quand on rentre chez soi, délivré de la rue .

Quand on rentre chez soi, délivré de la rue,
Aux fins d’automne où, gris cendré, le soir descend
Avec une langueur qu’il n’a pas encore eue,
La chambre vous accueille alors tel qu’un absent…

Un absent cher, depuis longtemps séparé d’elle,
Dont le visage aimé dormait dans le miroir ;
Ô chambre délaissée, ô chambre maternelle
Qui, toute seule, eût des tristesses de parloir.

Mais pour l’enfant prodigue elle n’a que louanges…
L’ombre remue au long des murs silencieux :
C’est le soir nouveau-né qui bouge dans ses langes ;
Les lampes doucement s’ouvrent comme des yeux,

Comme les yeux de la chambre, pleins de reproche
Pour celui qui chercha dehors un bonheur vain ;
Et les plis des rideaux, qu’un frisson lent rapproche,
Semblent parler entre eux de l’absent qui revint.

La chambre fait accueil ; et le miroir lucide
Pour l’absent qui s’y mire, est soudain devenu
Son portrait-grâce à quoi lui-même il élucide
Tant de choses sur son visage mieux connu,

Des choses de son âme obscure qui s’avère
Dans ce visage à la dérive où transparaît
Son identité vraie au fil nu du portrait,
Pastel qui dort dans le miroir comme sous verre !

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Jeudi poésie

Papiluc (clic) est à la barre du bateau des Croqueurs de mots pour la quinzaine . Il nous demande pour ce jeudi poésie un poème ou une chanson évoquant le pouvoir .

J’ai choisi « le pouvoir » de Georges Chelon, qu’on n’entend malheureusement plus beaucoup sur les ondes, mais qui a tant de choses à nous dire.

Le pouvoir

C’est le même jeu, mais pas les mêmes règles
Selon que tu en aies ou pas
Je veux dire des atouts, des cartes maîtresses
Savoir manipuler tout ça
Tu es la souris, tu es l’aigle
Tu es le fou, tu es le roi
Tu es ce que tu peux c’est là où le bât blesse
On ne choisit pas
On vit dans un pays où tous les hommes naissent
Libres et égaux en droits
Naître libre c’est bien, c’est le rester qui laisse
A désirer parfois
Quant aux droits ils ont plutôt tendance
A pencher du côté du plus fort
Les uns ont tous les droits, les autres peu de chance

*

Celui de se taire et encore
Posséder le pouvoir c’est le but suprême
C’est mieux que le Saint Graal ou que la Toison d’or
Certes c’est illusoire, éphémère mais quand même
On a le droit de vie, on a le droit de mort
C’est le jeu des lois, jeu de l’oie
Ça commence à se refermer sur toi
Tu te dis c’est la vie, c’est pas gagné d’avance
Pour tous les autres c’est comme ça
Alors pourquoi cet hélicoptère
Ces voitures précédées de motards
T’es scotché sur le siège de ton utilitaire
Tu vois passer les gyrophares
Posséder le pouvoir c’est le but suprême
C’est mieux que le Saint Graal ou que la Toison d’or

*

Certes c’est illusoire, éphémère mais quand même
On a le droit de vie, on a le droit de mort
C’est le fond de l’homme, c’est dans l’ordre des choses
Ce n’est pas près de changer
Mettez-lui un képi, un semblant d’uniforme
C’est déjà l’autorité
La peur du vide, la peur des autres
La peur de ne pas exister
Il hurle « Je suis là » et les autres chuchotent
Veuillez ne pas nous écraser
Pour quelques privilèges, une ombre de puissance
De pauvres considérations
Il est pris dans le piège de son insuffisance
Se voit déjà au Panthéon
Ôte-toi de mon chemin, j’avance
Passez devant je vous suis

Défi 283 des Croqueurs de mots .

Papiluc (clic) est à la barre du bateau des Croqueurs de mots pour la quinzaine . Il nous demande : Pour lundi 29 mai, un texte libre évoquant le cinéma, pourquoi pas, nous sortirons tout juste du Festival de Cannes, avec des calembours bêtes en hommage à Boby Lapointe.

Le 29 mai 1971, alors qu’il gambadait allègrement dans la verdoyante prairie de sa 23ème année mon mari est allé voir le film de José Giovanni, « un aller simple » qui lui a inspiré cette chanson lapointesque .

LA LAIE SANS RETOUR

Alleluia !

La laie l’ouit

l’hallali long.

La laie avait lu

dans le Chasseur français

que l’hallali

libère la laie.

La laie a longé

l’allée allongée.

Lulu l’a vue

Lulu avait lu

dans Tartarin de Tarascon

que la belle laie

à l’eau

laisse la lie.

Lulu a bu la lie

pour que la laie

boive là l’eau

jusqu’à la lie

plus là

jusqu’à se lasser

jusqu’à se laisser

rouler dans l’allée.

Et là Lulu

laissa la laie

une balle dans l’œil

comme il l’avait lu

dans le Journal des anciens combattants aveugles.

JC Fayet

Jeudi poésie

Papiluc (clic) est à la barre du bateau des Croqueurs de mots pour la quinzaine . Il nous demande pour ce jeudi poésie un poème ou une chanson évoquant le savoir .

Je vous propose de Pablo Neruda

La poésie

Et ce fut à cet âge… La poésie
vint me chercher. Je ne sais pas, je ne sais d’où
elle surgit, de l’hiver ou du fleuve.
Je ne sais ni comment ni quand,
non, ce n’étaient pas des voix, ce n’étaient pas
des mots, ni le silence:
d’une rue elle me hélait,
des branches de la nuit,
soudain parmi les autres,
parmi des feux violents
ou dans le retour solitaire,
sans visage elle était là
et me touchait.

Je ne savais que dire, ma bouche
ne savait pas
nommer,
mes yeux étaient aveugles,
et quelque chose cognait dans mon âme,
fièvre ou ailes perdues,
je me formai seul peu à peu,
déchiffrant
cette brûlure,
et j’écrivis la première ligne confuse,
confuse, sans corps, pure
ânerie,
pur savoir
de celui-là qui ne sait rien,
et je vis tout à coup
le ciel
égrené
et ouvert,
des planètes,
des plantations vibrantes,
l’ombre perforée,
criblée
de flèches, de feu et de fleurs,
la nuit qui roule et qui écrase, l’univers.

Et moi, infime créature,
grisé par le grand vide
constellé,
à l’instar, à l’image
du mystère,
je me sentis pure partie
de l’abîme,
je roulai avec les étoiles,
mon coeur se dénoua dans le vent.

Jeudi poésie

Rose à la barre du bateau des Croqueurs de mots nous demande un poème sur le mois de mai pour ce jeudi poésie .

Je vous propose d’abord une petite poésie de circonstance .

En mai, fais ce qu’il te plait

Bien entendu, ai-je  dit

et j’ai commandé la pluie.

Elle n’a pas déclaré forfait

Et se montre souvent depuis,

Du soleil prenant le relais.

Je glisse alors sans ennui

Avec sur le dos mon palais

Merci beaucoup dame  pluie 

Et ce beau poème de Victor Hugo

Mai

Je ne laisserai pas se faner les pervenches
Sans aller écouter ce qu’on dit sous les branches
Et sans guetter, parmi les rameaux infinis,
La conversation des feuilles et des nids.
Il n’est qu’un dieu, l’amour ; avril est son prophète.
Je me supposerai convive de la fête
Que le pinson chanteur donne au pluvier doré ;
Je fuirai de la ville, et je m’envolerai
– Car l’âme du poète est une vagabonde –
Dans les ravins où mai plein de roses abonde.
Là, les papillons blancs et les papillons bleus,
Ainsi que le divin se mêle au fabuleux,
Vont et viennent, croisant leurs essors gais et lestes,
Si bien qu’on les prendrait pour des lueurs célestes.
Là, jasent les oiseaux, se cherchant, s’évitant ;
Là, Margot vient quand c’est Glycère qu’on attend ;
L’idéal démasqué montre ses pieds d’argile ;
On trouve Rabelais où l’on cherchait Virgile.
Ô jeunesse ! ô seins nus des femmes dans les bois !
Oh ! quelle vaste idylle et que de sombres voix !
Comme tout le hallier, plein d’invisibles mondes,
Rit dans le clair-obscur des églogues profondes !
J’aime la vision de ces réalités ;
La vie aux yeux sereins luit de tous les côtés ;
La chanson des forêts est d’une douceur telle
Que, si Phébus l’entend quand, rêveur, il dételle
Ses chevaux las souvent au point de haleter,
Il s’arrête, et fait signe aux Muses d’écouter.

Défi 282 des Croqueurs de mots

Pour ce défi 281 des Croqueurs de mots ( clic sur le logo ) c’est Rose ( clic ) qui tient la barre du bateau et elle nous dit :

Votre enfance au mois de mai ou pas .

J’aurais pu évoquer ces mois de mai des communions, petite et solennelle, où le blanc des tenues est à la fête pour célébrer ce jour si particulier . Toute la famille réunie se retrouve après la messe autour d’une table bien garnie, dans une chaleureuse ambiance où la musique elle aussi trouve sa place , piano, violon , violoncelle , alto étant de la partie .

J’aurais pu aussi vous parler de la foire de mai que je ne manquais jamais, qui se trouvait alors au centre ville . Que d’envols merveilleux sur ces petits avions, d’aventures à bicyclette ou en petit train , sans jamais oublier de guetter ce satané pompon qui jouait au yoyo .

J’aurais pu aussi vous emmener en forêt pour de mémorables pique – nique en famille ou avec des amis, de quoi vous sentir en pleine forme et profiter d’une belle journée ensoleillée .

J’aurais pu encore vous parler des premières sorties en extérieur de « Doudoune », mon cochon d’Inde, juste à la limite du petit bois, mais du plus loin que je me souvienne , le mois de mai est pour moi indissociable de l’arrivée du hanneton , ce Maikäfer ( scarabée de mai ) qui allait faire l’objet de multiples observations pendant les cours de sciences naturelles à l’école primaire.

Au premier bourdonnement caractéristique de ses ailes, au coucher du soleil , la chasse pouvait commencer. Seule à l’affut , bien abritée par les taillis du petit bois, je guettais l’ arrivée de ces drôles d’insectes sortis de terre après avoir passé trois ans à l’état de larve. Inutile de se munir d’un filet, il suffisait d’attendre qu’ils se posent sur les feuilles des arbustes pour les consommer, et là, d’un geste rapide, je les cueillais immédiatement. Je me souviens encore de ce chatouillis dans la main quand leurs pattes essayaient de se sortir de l’étreinte les maintenant prisonniers. Parfois, un hanneton arrivait à passer entre le pouce et l’index et trouvait le chemin de la liberté.

De toute façon peu m’importait, je n’en gardais qu’un. Je le mettais de suite dans une boite en carton tapissée de feuillage dont le couvercle avait été percée de nombreux trous . Le lendemain dans la cour de l’école nous exhibions fièrement, mais avec moultes précautions, nos trésors en soulevant doucement le couvercle des boites. Il arrivait que, là aussi, certains candidats à l’évasion nous faussent compagnie. Mais il en restait suffisamment pour que toutes les élèves puissent les observer dans un petit terrarium en classe. Je n’ai pas gardé le cahier où consciencieusement nous le dessinions, mais je me revois encore tracer le contour des élytres brun rougeâtre , reproduire le plumet délicat des antennes . Qu’il soit considéré comme nuisible m’importait peu, il n’était pas question de lui faire le moindre mal. Dès la classe terminée je m’empressais de le relâcher en le laissant prendre son envol depuis le dos de ma main .

Jeudi poésie

Rose ( clic) est à la barre du bateau des Croqueurs de mots pour la quinzaine et pour ce jeudi elle nous demande un poème sur le muguet .

M    utines     clochettes   au   vent   carillonnent

  ne    joyeuse    aubade    au    mois   nouveau.

G  azouillant, les   petits  oiseaux  s’époumonent,

U    nissant  leurs  voix  pour  fêter le renouveau,

E   n   mai   petits   bonheurs  à  ta porte sonnent

T res souvent, garde près de toi tous ces joyaux.

GF 03 /05/2018

Jeudi poésie

Un clic sur le logo pour les croqueurs de mots .

Renée à la barre du bateau des Croqueurs nous demande pour ce jeudi un poème avec des œufs .

Je vous propose ce poème de Ronsard

Je vous donne des oeufs. L’oeuf en sa forme ronde
Semble au Ciel, qui peut tout en ses bras enfermer,
Le feu, l’air et la terre, et l’humeur de la mer,
Et sans estre comprins comprend tout en ce monde.

La taye semble à l’air, et la glère féconde
Semble à la mer qui fait toutes choses germer :
L’aubin ressemble au feu qui peut tout animer,
La coque en pesanteur comme la terre abonde,

Et le ciel et les oeufs de blancheur sont couvers.
Je vous donne (en donnant un oeuf) tout l’Univers :
Divin est le présent, s’il vous est agréable.

Mais bien qu’il soit parfait, il ne peut égaler
Vostre perfection qui n’a point de semblable,
Dont les Dieux seulement sont dignes de parler.

Défi 281 des Croqueurs de mots

Renée ( clic) à la barre du bateau des Croqueurs de mots pour la quinzaine nous demande un texte humoristique qui va nous parler du chocolat .

Ding, ding, dong, la cloche du  petit déjeuner se dandine. Donnez vous la peine d’entrer ,  déposez vos dignes postérieurs sur ces sièges douillets et puis comme dehors il fait encore bien frais, je vous propose  le chocolat Dingo pour débuter. Dressez bien vos oreilles et cliquez ici .

Pas de doute avec la bise du nord – est vous l’ apprécierez chaud . Comment ? le chocolat est notre ennemi ? Mais enfin, fuir devant l’ennemi c’est lâche, et quelque soit le problème ou la question, le chocolat est toujours la bonne réponse .

Toc, toc , toc, qui est là ? c’est l’amour de votre vie , si, si , c’est la marmotte qui l’a dit . Vous savez celle qui met le chocolat dans le papier d’alu , non vous n’avez pas la berlue. Elle a même rajouté, à l’intention de celles et ceux qui auraient quelques scrupules, que la vraie force c’est de pouvoir casser une barre de chocolat en quatre et de n’en manger qu’un seul carré .

Alors n’hésitez pas :

C hantez le chocolat sur tous les tons

H aro sur le régime qui déprime ,

O sez négliger le qu’en dira- t – on,

C roquez le bien, ce n’est pas un crime.

O ffrez – vous sans peine son fondant

L à, sur vos papilles, il s’exprime

A vec délicatesse et ranime

T ous les arômes sans accident.

Jeudi poésie

Renée ( clic) à la barre du bateau des Croqueurs pour la quinzaine nous demande :

un poème ou une chanson qui évoque Pâques .

Après vous avoir parlé de la cravate de Verlaine, je ne pouvais que choisir Pâques de Paul Verlaine

De
Rome, hier matin, les cloches revenues
Exhalent un concert glorieux dans les nues.

L’écho puissant qui flue et tombe de la tour
Vient magnifier l’air et la terre à leur tour,

L’oiseau, sanctifié par l’or des salves saintes.

Lui-même entonne un hymne aimable et, las de plaintes,

Clame l’alléluia sur un air de chanson.

Dans l’arbre, au ras des prés, et parmi le buisson.

L’alouette, un motet au bec, s’est envolée ;
Le rossignol a salué l’aube emperlée

D’accents énamourés d’un amour plus brûlant,
Et comme lumineux d’un bonheur calme et lent.

Le printemps, né d’hier, allègrement frissonne ;
La nature frémit d’aise, et voici que sonne

Partout dans la campagne, au cœur des vieux beffrois
De l’allier campanile et du palais des rois.

Et de tous les fracas religieux des villes

Des
Paris aux
Moscous, des
Londres aux
Sévilles.

Le frais appel pour l’aime célébration
De l’almissime jour de résurrection …

La colombe vole au sillon et l’agneau broute.
Dis-nous,
Marie, qui tu rencontras en route ?

Le fleuve est d’or sous le soleil renouvelé… «
C’est le seigneur : en
Galilée il est allé ! »


Ah ! que le cœur n’est-il lavé dans l’or du fleuve !
Sanctifié dans l’or des cloches, l’âme veuve !

Et que l’esprit n’est-il humble comme l’agneau.
Blanc comme la colombe en ce clair renouveau,

Et que l’homme, jadis conscience introublée.
N’est-il en route encore pour la
Galilée !

Et parceque je ne pouvais pas écarter Louis Aragon :

les trois Pâques

À la première Pâque il fleurit des lilas
La terre est toute verte oublieuse d’hiver
Tout le ciel est dans l’herbe et se voit à l’envers
À la première Pâque   

À la Pâque d’été j’ai perdu mon latin
Il fait si bon dormir dans l’abri d’or des meules
Quand le jour brûle bien la paille des éteules
À la Pâque d’été

À la Pâque d’hiver il soufflait un grand vent
Ouvrez ouvrez la porte à ces enfants de glace
Mais les feux sont éteints où vous prendriez place
À la Pâque d’hiver.

Trois Pâques ont passé revient le Nouvel An
C’est à chacun son tour cueillir les perce-neige
L’orgue tourne aux chevaux la chanson du manège
Trois Pâques ont passé

Revient le Nouvel An qui porte un tablier
Comme un grand champ semé de neuves violettes
Et la feuille verdit sur la forêt squelette
Revient le Nouvel An.

Saisons de mon pays variables saisons
Qu’est-ce que cela fait si ce n’est plus moi-même
Qui sur les murs écris le nom de ce que j’aime
Saisons de mon pays
Saisons belles saisons.

Louis Aragon