
Pour le tableau du samedi, initié par Lady Marianne et poursuivi par Lilou et Fardoise, un clic sur le logo.
Fardoise nous dit : Quand l’Histoire s’invite dans la peinture , un genre à part entière
Je vous propose , la bataille de Solferino (1861) par Adolphe Yvon

Présent sur le théâtre des opérations militaires le peintre nous montre un instant précis de la bataille . La lumière est dirigée sur Napoléon III à cheval, entouré de son état major au mont Fenile . Il montre du doigt au général Camou les hauteurs de Solférino . Ce dernier reçoit l’ordre d’envoyer la garde impériale afin de s’emparer de ces hauteurs .
“ Quoique la journée soit très peu avancée, l’Empereur comprend tellement que sur les hauteurs de Solférino est le gain de la bataille, qu’il n’hésite pas à engager dès à présent sa Garde, son unique réserve ”, remarque le baron de Bazancourt, qui souligne ainsi les qualités de stratège de Napoléon III. Le témoignage du général comte de Fleury est sensiblement différent : il fait de Napoléon un spectateur quelque peu passif et revendique l’honneur d’avoir incité le souverain à faire donner sa Garde au moment voulu
J’aime particulièrement ce tableau plein de contrastes, tant au niveau de la lumière, concentrée sur l’empereur en opposition aux fumées sombres des hauteurs de Solférino que dans le mouvement . Si la majorité de l’état major semble plutôt figé dans une pause autour de l’empereur , le général Camou et ses hommes sont dans l’action sabres et baïonnettes en avant .
Pour en savoir plus sur ce peintre de l’Histoire voici la fiche que lui a consacrée mon mari .
YVON Henry Frédéric Adolphe
Eschviller (commune de Volmunster, 57) 1817 – Paris (16e) 1893
Peintre et dessinateur, professeur de peinture et de dessin
Fils d’un receveur des douanes qui fut ensuite contrôleur de cette administration.
Son père était né à Dourdan ((91). Sa mère, née à Neuhausen (actuelle Rhénanie-Palatinat), était la sœur du futur général NEUMAYER. Ils s’étaient mariés en 1812 à Worms (alors département français du Mont-Tonnerre).
Son père ayant été nommé au Havre, YVON ne passa que sa prime enfance en Moselle. Il étudia au collège de Bourbon, à Paris (actuel lycée Condorcet), puis à celui du Havre. Déjà attiré par le dessin, il prit quelques leçons de peinture auprès de Jacques François HOCHARD. Ancien élève du baron GROS, ce peintre enseignait au collège du Havre où il fut plus tard le premier maître de Claude MONET. Pour satisfaire sa famille, YVON travailla à partir de 1835 comme surnuméraire de l’administration des forêts à Breteuil (27), tout en peignant pendant son temps libre. Nommé en 1838 secrétaire de l’inspecteur de la forêt de Dreux en résidence à Anet (28), il démissionna huit mois plus tard pour s’installer dans la capitale et se consacrer à l’art. En 1839, il s’inscrivit à l’atelier de Paul DELAROCHE et fut admis à l’Ecole nationale des beaux-arts. Il débuta deux ans plus tard au Salon auquel il envoya d’abord des portraits et des tableaux religieux. Il fréquentait alors Toussaint CHARLET et Horace VERNET qui ne sont pas étrangers à sa vocation de peintre militaire. Attiré par les contrées orientales, il fit en 1846 un voyage de six mois en Russie avec le projet de peindre la bataille de Koulikovo qui avait vu la victoire des Russes sur les Mongols au XIVe siècle. Outre la recherche de documentation et la visite des lieux des combats, ce séjour fut l’occasion de représenter la vie quotidienne russe. Son statut de peintre d’histoire s’affirma avec Le maréchal Ney à la retraite de Russie présenté à l’Exposition universelle de 1855. En avril 1856, il épousa à Paris (ancien 11e) Caroline RAMBAUD, fille d’un ancien pharmacien né à Vittel. Cette même année, il partit pour la Crimée en passant par Athènes et Constantinople, afin de glorifier les récentes victoires de l’armée française. Désormais peintre officiel des campagnes du Second Empire, Yvon se rendit en 1859 en Lombardie où il fut pour la première fois en contact direct avec les réalités de la guerre. Les commandes dont il bénéficiait depuis près de vingt ans lui permirent de faire construire rue de la Tour un hôtel particulier somptueusement décoré. Fuyant les troubles de la Commune, il se réfugia à Londres en 1871 et trouva à son retour sa maison et son atelier saccagés. Il opta bien évidemment pour la France en mai 1872. Bien que sa renommée fût moins grande que sous l’Empire, il conserva ses fonctions sous la IIIe République et peignit les portraits de personnalités politiques, militaires et artistiques. Professeur de peinture des cours du soir à l’Ecole des beaux-arts depuis 1864, il devint en 1883 professeur de dessin de l’enseignement simultané des « trois arts ». Il enseigna aussi le dessin à l’Ecole polytechnique de 1881 à 1887. Il fut inhumé au cimetière d’Auteuil.
Sa carrière officielle lui valut récompenses et honneurs. Il obtint une médaille de 1ère classe au Salon de 1848, une de 2e classe et la croix de la Légion d’honneur à la suite de l’Exposition universelle de 1855. La grande médaille d’honneur lui fut attribuée au Salon de 1857 et, dix ans plus tard, il reçut une médaille de 2e classe à l’Exposition universelle et fut promu officier de la Légion d’honneur en 1868. Il participa aussi aux Expositions universelles de Vienne en 1873 (dans le cadre des envois de la Ville de Paris), de Paris en 1889 et de Chicago en 1893. Apprécié aux Etats-Unis, il s’était vu commander en 1870 par le richissime marchand Alexander T. STEWART une toile monumentale représentant de façon allégorique la réconciliation du Nord et du Sud. Selon David KAREL, il séjourna outre-Atlantique et participa à quelques expositions de la Royal Academy de Londres entre 1851 et 1874. Vers 1880, il peignit un panorama célébrant la victoire des Anglais sur les Zoulous à Ulundi. Il était membre des Académies de Saint-Pétersbourg (1859) et d’Amsterdam.
S’il n’avait de lien avec la Lorraine que par le lieu de sa naissance, il prit cependant part au Salon de Nancy en 1878.
YVON abandonna assez vite les sujets religieux de ses débuts et c’est dans la peinture militaire qu’il conquit sa renommée. Ses vastes compositions (parfois plus de 50 m2) reposent sur une solide documentation réalisée sur le terrain et sur de nombreuses études préparatoires dessinées ou peintes. Jules VERNE fut impressionné par la Prise de la tour de Malakoff : « Le tableau de M. Yvon est exécuté dans des proportions colossales ; sa distribution en est simple, ingénieuse, intelligente ». (1857). Par contre, Maxime DU CAMP critiqua vivement sa Bataille de Solférino du Salon de 1861 : « M. Yvon n’y va pas de main morte, il casse les vitres à coups de poing, et à force de vouloir être réel, il arrive à l’invraisemblable. Ça me serait à peu près indifférent si le tableau était bon, mais il est mauvais, mollement peint, d’un pinceau grossier malgré la composition qu’on a voulu rendre épique ». S’il faut leur reconnaître un inévitable caractère de propagande politique, ces scènes militaires allient cependant intérêt documentaire et qualités artistiques, notamment une sobriété du coloris qui lui fut parfois reprochée. Il fut aussi un portraitiste apprécié comme le confirme ce jugement à propos du portrait de M. Bertin : « Cette peinture ferme et crâne, avec cette expression vivante, est une des plus magistrales du Salon ». Théodore VÉRON (1881). Il ne faut pas oublier les scènes de genre inspirées de ses voyages qui font de lui un peintre orientaliste non négligeable. Signalons enfin César, tableau allégorique présenté au Salon de 1875 où la figure équestre de l’empereur romainescortée de la misère et de la mort représente de toute évidence dernier empereur des Français. Réelle rancœur à l’égard d’un protecteur face auquel l’artiste avait dû faire des concessions ou simple désir de s’attirer les faveurs du nouveau régime ?
Il réalisa aussi des peintures décoratives pour la salle du conseil municipal de l’Hôtel de Ville de Paris. Terminées vers 1867, elles furent détruites dans l’incendie de 1871 :
- Clovis porté sur le pavois fait de Paris sa capitale
- Philippe-Auguste partant pour la Terre Sainte confie la tutelle de ses enfants et son trésor aux bourgeois de Paris
- François 1er pose la première pierre de l’Hôtel de Ville
- Napoléon III remet au baron Haussmann le décret d’annexion à Paris des communes limitrophes
Le Musée du Château de Compiègne conserve des œuvres réalisées par l’artiste pour la décoration de son hôtel particulier (oiseaux d’ornement, angelots sur fond de ciel).
Sa connaissance de la Russie lui valut de réaliser avec Louis BOULANGER et Théodore CHASSÉRIAU les décors de Schramyl, drame de Paul MEURICE créé en 1854 au Théâtre de la Porte-Saint-Martin.
Certains de ses dessins sont des œuvres à part entière jugées dignes d’être présentés au Salon, qu’il s’agisse de souvenirs de voyage ou de créations plus personnelles comme Les sept péchés capitaux qui firent l’admiration de DELACROIX. Mais la grande majorité de sa production dessinée consiste en études pour ses tableaux. Le Département des arts graphiques du Louvre et le Musée du Château de Versailles en conservent un grand nombre. Il utilisait occasionnellement le pastel pour des portraits ou des scènes de genre.
YVON est l’auteur d’un ouvrage pédagogique :
- Méthode de dessin à l’usage des écoles et des lycées, Paris, L. Hachette et Cie, 1867
Auguste FEYEN-PERRIN* fut un de ses nombreux élèves.