Le tableau du samedi

Pour le  tableau du samedi, initié par Lady Marianne et poursuivi par Lilou et Fardoise, un clic sur le logo.

Pour cette quinzaine Lilou nous dit :

Mars arrive, mais non je ne vous proposerai pas encore le Printemps mais le sommeil, puisque la nature et les hommes vont se réveiller et sortir de cette torpeur dont le froid nous englobe.

Ce samedi je vous propose cette jeune femme endormie de Jacques Majorelle

J’aime beaucoup le choix de l’artiste d’à peine esquisser le fond, le corps ébène se détache de la couleur claire mettant en valeur le jeu des courbes et des reflets lumineux. Une sensualité dévoilée avec beaucoup de délicatesse dans cette œuvre.

Installé au Maroc depuis 1917, Jacques Majorelle découvre l’Afrique Noire en 1945. . La beauté des femmes noires exerce sur l’artiste une fascination profonde, perceptible dans la pose lascive de ce modèle. Réalisé en 1952 lors de son séjour à Bingerville (actuelle Côte d’Ivoire), ce tableau se rapproche de l’œuvre Le pagne rose (Cf. Jacques Majorelle, Rétrospective, catalogue de l’exposition du musée des Beaux-Arts de Nancy, RMN, 1999, p. 189). 

Le sommeil est présent dans de nombreuses toiles de cette période africaine.

Pour en savoir plus voici la fiche de mon mari sur ce peintre et graveur né à Nancy en 1886 . Je vous fais grâce de la liste d’œuvres, il y en a cinq pages.

MAJORELLE  Jacques

Nancy 1886 – Paris (16e) 1962

Peintre et graveur en taille-douce

Fils unique de Louis MAJORELLE* ; petit fils d’Auguste MAJORELLE*.

Evoluant dès l’enfance dans un milieu artistique privilégié, il fut encouragé dans son goût pour le dessin par les amis de son père Victor PROUVÉ* et Emile FRIANT* dont il fréquenta l’atelier nancéien. Dès son adolescence, il peignait sur le motif en Lorraine ou en Bretagne lors des villégiatures de sa famille. De 1901 à 1903, il fréquenta l’Ecole des beaux-arts de Nancy, section architecture et décoration. Renonçant à l’architecture pour devenir peintre et dispensé de service militaire, il se rendit à Paris et s’inscrivit en 1906 à l’Académie Julian où il suivit des cours de dessin dans l’atelier « S R » (François SCHOMMER et Henri ROYER*). En 1908, il se rendit en Espagne puis à Venise. Il débuta cette année-là au Salon des Artistes français dont le catalogue le dit élève de ROYER et de Marcel BASCHET. Deux ans plus tard, exposa ses vues de Venise dans le salon du magasin de son père, rue Saint-Georges à Nancy. Il prit part au Salon de sa ville natale en 1909 et 1913 ainsi qu’à l’exposition de Remiremont cette dernière année. De 1910 à 1914, il fit trois séjours prolongés en Egypte, remontant le Nil jusqu’à Louxor et Karnac lors de son dernier voyage. Il présenta ses œuvres égyptiennes à Nancy en 1913 à l’exposition « Nymphéa » puis en 1919 à la Chambre de Commerce, après les avoir exposées au Caire à diverses reprises. Plusieurs de ses paysages égyptiens ornaient le boudoir présenté par son père à Paris, au Salon d’Automne de 1913. Une maladie pulmonaire chronique lui valut d’être affecté en 1914 comme employé de bureau au 26e régiment d’infanterie de Nancy puis réformé. En 1916, il suivit sa famille à Paris et fit un nouveau séjour en Bretagne.

L’année suivante, il séjourna dans un sanatorium suisse puis dans le Var avant de s’embarquer pour le Maroc où il bénéficia de l’appui du général LYAUTEY. Installé à Marrakech, il y épousa en 1919 Andrée Marie LONGUEVILLE, originaire du Lunévillois, qui l’avait accompagné et dont il eut deux enfants. Il acquit trois ans plus tard une palmeraie où il se fit construire une luxueuse villa inspirée du style mauresque autour de laquelle il aménagea un jardin luxuriant puis un atelier de style Art déco en 1931. A partir de 1921, il se rendit régulièrement dans l’Atlas et l’Anti-Atlas dont il devint le chantre inspiré, notamment dans un superbe portfolio préfacé par LYAUTEY :

  • Les Kasbahs de l’Atlas (30 planches en quadrichromie rehaussées d’or et d’argent, tirage de 500 ex.). Paris, Jules Meynial, 1930 (1 ex. au M. des BA de Nancy)

Il a écrit des notes de voyage qui furent publiées sous le titre :

  • Carnet de route d’un peintre dans l’Atlas et l’Anti-Atlas, Nancy, Victor Berger, 1922

Il effectua de nouveaux séjours dans l’Atlas pendant la Seconde Guerre mondiale et découvrit ensuite l’Afrique noire, parcourant successivement le Soudan français (1945-46), la Guinée (1947-48), la Côte d’Ivoire, le Niger et le Sénégal (1952). La fin de sa vie fut difficile : amputation d’un pied en 1957 à la suite d’un accident de voiture, divorce suivi d’un remariage en 1961 avec Marie-Thérèse HAMANN, née à Port-au-Prince (Haïti). L’année suivante, il fut rapatrié à Paris à la suite d’une fracture du fémur et mourut peu après. Il repose à Nancy dans le caveau familial du cimetière de Préville.

Artiste reconnu, il fut nommé en 1929 chevalier de la Légion d’honneur pour ses talents de peintre mais aussi pour les expéditions organisées  à ses frais dans l’Atlas, région encore inexplorée par l’armée française. Il fut promu officier en 1957.

Outre le Salon de Nancy auquel il continua de participer épisodiquement entre 1920 et 1950, J. MAJORELLE prit part en 1914 à l’exposition des Beaux-Arts de Longwy et en 1920 à l’exposition nationale de Metz. Après la Première Guerre, il organisa de nombreuses expositions de ses œuvres, tant au Maroc que dans la capitale. En 1924, il participa à la galerie Georges Petit à la troisième exposition du groupe « La Kasbah » puis présenta plus de soixante œuvres au Cercle artistique de l’Est, rue Gambetta à Nancy.

Dans sa ville natale, il était représenté à plusieurs expositions collectives :

  • 1913 : exposition de peinture à l’eau, à la Bourse de Commerce
  • 1914 : « Exposition d’art impressionniste », à la galerie d’art des Magasins Réunis
  • 1919 : « Majorelle et les frères Mougin » (tableaux d’Egypte), à la Chambre de          Commerce
  • 1920 : « Congrès des jeunes », à l’Ecole des BA
  • 1921 : Salon des portraits et dessins de l’Est artistique
  • 1931 : dans le cadre de la semaine coloniale (avec V. PROUVÉ), galerie des            Magasins Réunis
  • 1935 : Salon des artistes lorrains
  • 1943 : « Les colonies françaises vues par les artistes lorrains », au M. des BA
  • 1993 : « De Charles de Meixmoron à Etienne Cournault – Rétrospective – 1892-        1950 », au M. des BA

Plusieurs rétrospectives personnelles lui ont été consacrées :

  • 1965 : Galerie Venise-Cadre, à Casablanca
  • 1967 : Hôtel Mamounia, à Marrakech
  • 1999-2000 : M. des BA de Nancy et Institut du monde arabe, à Paris

Avant 1914, MAJORELLE se consacra avant tout au paysage mais peignit aussi des portraits et des nus. Malgré quelques réserves, à propos de son premier envoi au Salon (un nu), Gaston VARENNE sut déceler son talent prometteur : « Dès maintenant, on ne saurait refuser cependant à M. Majorelle un très grand sens artiste, un goût de la couleur qui trouvera mieux à s’affirmer dans d’autres sujets » (1908). Sans céder au pittoresque, ses paysages vénitiens et égyptiens se caractérisent par l’éclat du coloris et par de larges empâtements au service d’une composition serrée. Par contre, ses portraits de cette période dénotent l’influence de FRIANT et de ROYER par la sobriété de la palette et la délicate précision avec laquelle il traite les visages. Les œuvres marocaines révèlent son insatiable curiosité pour ce pays et un renouvellement constant de sa technique. La vie animée des souks est d’abord évoquée de façon informelle, les foules étant traitées sous forme de silhouettes au service de la composition d’ensemble. Dans les scènes de la vie collective, il s’oriente ensuite vers un style très graphique où les couleurs vives font place, quelques années plus tard, à une gamme chromatique limitée où dominent le blanc et les ocres. Dans les années vingt, ses expéditions dans les solitudes de l’Atlas lui inspirent des paysages minéraux servant d’écrin aux kasbahs et villages dont les constructions cubiques se prêtent aux contrastes lumineux dans toutes les nuances d’ocre et de vieux rose. A la fin de cette décennie, il aborde une technique mixte dans des œuvres sur papier ou sur bois où le pastel, la gouache ou la détrempe sont associés à des rehauts d’oxydes métalliques qui accentuent leur caractère décoratif. S’il continue à s’intéresser aux rassemblements humains, il accorde à partir de 1931 une large place au charme de la femme africaine, peignant d’abord des « négresses nues » qu’il fait poser dans sa propriété, au repos ou cueillant des fruits. Leurs attitudes et le synthétisme du style rappellent parfois le primitivisme des Tahitiennes de GAUGUIN. Les portraits et les nus plus tardifs de la période d’Afrique noire se caractérisent par un  hyperréalisme, l’artiste excellant à traduire, avec une grande sensualité, le velouté de la peau de ses modèles. Parallèlement, il peint des paysages forestiers et des scènes villageoises aux couleurs éclatantes où domine le fameux « bleu Majorelle » dont il a couvert en 1937 les murs extérieurs de son atelier.

Dans le domaine des arts graphiques, il grava à l’eau-forte des vues de l’Egypte et de l’Atlas marocain, reprenant généralement les sujets de ses tableaux. Il abandonna peu à peu la manière noire pour des eaux-fortes au graphisme plus épuré. Il réalisa aussi quelques affiches chromolithographique vantant les attraits de son pays d’adoption.

Intéressé par l’artisanat marocain, MAJORELLE fit réaliser à partir de 1919, par les Ateliers d’art indigène installés dans son jardin et gérés par son épouse, des pièces de cuir peint ou brodé de soie destinées à décorer des meubles, des poufs et autres objets qu’il présenta en 1925 à Paris, dans le cadre de l’Exposition internationale des Arts décoratifs.

En 1924, il peignit dans le style mauresque le plafond de la salle à manger de l’hôtel Mamounia de Marrakech pour lequel il réalisa aussi un ensemble de mobilier en bois peint.

Comme le résumait Gaston Varenne en 1930, « Jacques Majorelle a vraiment ouvert à l’orientalisme français des voies nouvelles » et il connaît une vogue croissante confirmée par sa cote lors des ventes publiques.

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